mercredi 17 décembre 2008

Au delà des Justes

doro[t]|association d’histoire et le comité « Jews rescued Jews » basé en Israël ont conclu un accord de partenariat afin de promouvoir en France et en Europe la recherche et la reconnaissance des juifs qui ont sauvé des juifs.
A l’instar des Justes des nations, titre réservé aux non juifs ayant participé au sauvetage des juifs pendant la Shoah, de nombreux juifs ont individuellement ou dans le cadre d’un réseau clandestin ou d’une organisation participé au sauvetage tout en mettant leur vie en péril.

A ce jour seul le CJRJ a entrepris un travail de recensement des individus et organisations qui en Europe ont participé à des actions de sauvetage.
doro[t]|association d’histoire et le CJRJ vont mettre en place une base de données biographique et géographique concernant les sauveteurs et publier à destination des scolaires et du grand public via le web et l’édition une collection de portrait de sauveteurs, engagés qui entre 1933 et 1945 ont par leurs actes individuels ou collectifs participé au sauvetage d’une personne ou d’un groupe.


L'image stéréotypée inscrite dans la mémoire de la Shoah peut se résumer par une double dichotomie.

Du coté juif
D'une part, les 6 millions de martyrs assassinés, torturés, gazés
D'autre part, les héroïques combattants des ghettos et des résistants

Du coté non juif
D'une part, les initiateurs nazis, les bourreaux, les tortionnaires et leurs complices actifs ou passifs,
D'autre part, les justes, leur courage et esprit humanitaire ayant protégé et sauvé les persécutés

Cette image quasi manichéenne occulte complètement l'héroïsme des milliers de juifs qui, individuellement ou au sein d'organisations, ont sauvé des dizaines de milliers d'âmes.

Ce n'est que tout récemment que Yad Vashem à Jerusalem a décidé de réparer partiellement cet oubli et de consacrer a cette action de sauvetage un département dans ses nouveaux bâtiments.
Pourquoi cette omission de rappeler que, partout en Europe, pendant toute la durée des opérations d'extermination, des hommes et des femmes ont agi, le plus souvent au péril de leur vie, pour sauver leurs frères et sœurs des griffes des assassins?

Pourquoi parle-t-on si peu des installations de caches, d'organisation de passages clandestins de frontières, de fabrication et de diffusion de faux papiers d'identité?

Pourquoi fait-on si peu cas des réseaux organisant l'évasion de détenus et de déportés des camps de concentration?

Et comment expliquer la discrétion sur l'action des institutions ayant créé et géré des lieux de refuge pour des milliers d'enfants?

Pourtant, dans la situation de la solution finale, sauver un maximum de vies fut la stratégie la plus utile et la plus efficace. Le grand nombre de ceux qui doivent leur survie à ces actions en sont un témoignage éloquent.

Bien entendu, cela n'enlève rien à l'héroïsme des combattants des ghettos et de la résistance armée. En effet, le choix ne consistait pas entre tuer un allemand ou sauver un juif, mais entre les moyens, très limités, dont on disposait pour combattre l'ennemi. Or, la possibilité de se battre les armes à la main, n'a été donnée qu'à une infime minorité de juifs; les autres, hommes et femmes de courage, devaient accomplir leur devoir par des actions de sauvetage.

Certains tentent à minimiser l'héroïsme des sauveteurs juifs en invoquant leur devoir de solidarité à l'égard de leurs frères. Ils oublient cependant que ces hommes et femmes auraient pu préférer sauver leur propre vie et celles des leurs, plutôt que de les mettre en péril pour les autres.

Le commandement "Ne sois pas inactif en présence de ton prochain en danger" (Lévitiques XIX, 16), n'oblige pas de risquer sa propre vie pour sauver celle d'autrui. Il n'implique pas le travail d'imagination, de ruse, l'engagement physique et moral, le vécu des angoisses de chaque instant des actions de sauvetage.

Les raisons de cette occultation, il faut les chercher, me semble-t-il, plus en profondeur.

En premier lieu, dans le désir des pères fondateurs de l'Etat d'Israël de présenter à leurs concitoyens et plus particulièrement à leur jeunesse, une image simpliste de la Shoah, plus conforme aux valeurs du jeune Etat. Face à l'ennemi, une seule solution: combattre les armes à la main. D'où l'exaltation exclusive des combattants des ghettos, des partisans et résistants juifs.

Dans cette représentation quasi manichéenne victimes héros, c'est tout juste si les survivants ne se trouvaient pas culpabilisés.

Quant au courage des sauveteurs, il s'insérait difficilement dans un système de valeurs tendant à évaluer tout ce qui rappelait de juif de la diaspora (le juif "galoutique"). A quoi ressemble en fait l'action de ces sauveteurs? Les métiers qu'ils pratiquaient n'étaient-il pas ceux de faussaires, de passeurs, de contrebandiers, d"organisateurs de planques, d'intercesseurs auprès des autorités, de corrupteurs, etc.? Or, ces activités ne rappelaient que trop la démarche traditionnelle du juif diasporique, tentant d'échapper aux brimades et aux persécutions – attitude incompatible avec l'image du courage viril du combattant que l'on cherchait à inculquer à la jeunesse d'Israël.

Quant à ceux de la diaspora, qui ont toujours eu tendance à se regarder avec les yeux des autres, ils trouvaient presque indécent de se glorifier du courage des juifs qui sauvaient des juifs, alors que certains de leurs compatriotes résistaient ou faisaient la guerre les armes à la main. D'ailleurs, à trop insister sur ces actes, ne risquait-on pas d'alimenter l'image péjorative de la solidarité du clan au détriment de la nation?

Après 70 ans d'oubli et d'occultation, il n'est que temps maintenant de célébrer l'héroïsme des actions de sauvetage accomplies par des juifs. Il est temps de dire que des milliers d’hommes et de femmes de tous âges ont risqué leurs vies pour sauver, souvent avec succès, leurs frères et soeurs, que leur sacrifice était celui qui a le plus contribué à faire échouer le projet nazi d'extermination totale des juifs d'Europe.

Dans ces circonstances uniques dans l'histoire, sauver une âme pouvait être bien plus important que tuer un ennemi.

"Tu raconteras à ton fils" nous recommande la Torah. Ce ne sont pas des martyrs d'Egypte que nous remémorons autour de la table du Seder, mais le courage des couples juifs qui ont continué à procréer, alors qu'on tuait leurs enfants, le courage de ce peuple de se délivrer du confort relatif de ses chaînes et de partir à travers l'inconnu du désert vers une terre promise.

Nous devons aussi rappeler à nos enfants le courage, l'héroïsme des hommes et des femmes qui, dans l'enfer de la Shoah, ne se sont jamais résignés et se sont battus pour chaque vie à sauver.

Le combat, le sacrifice de ces milliers de sauveteurs, leurs actes de bravoure est pour nous une source de fierté au milieu du désastre de la Shoah. C'est cette image qui doit être transmise à nos enfants, l'image de ce peuple qui dans cette barbarie sauvage a su garder son visage humain.

samedi 6 décembre 2008

Darcos oublie les internements de 39 et 40 et les réfugiés juifs

"Ainsi, dans la décennie précédant 1940, les Juifs étrangers viennent essentiellement d’Europe de l’Est ou des Balkans. Les motifs de leur immigration sont politiques et économiques. Si ces Juifs immigrés de l’Est européen sont eux-mêmes très désireux de s’intégrer à la société française, ils restent profondément attachés à la culture du monde yiddish."

Voici ce que les enseignants français trouveront dans le dernier numéro de "Ressources pour la classe", intitulé Mémoire et Histoire de la Shoah destiné à mettre en œuvre la circulaire de juillet 2008 relative à l'enseignement de la Shoah.
Sur les trente neuf pages que compte la publication, pas une ligne sur les mesures d'internement prises en France entre 1939 et 1940. Pas une ligne sur les arrestations de mai 1940 et encore plus choquant pas une ligne sur l'internement à Gurs en octobre 1940 des juifs raflés au pays de Bade. Bien entendu pas une ligne sur les enfants internés dans les camps de Gurs, Bram, Rivesaltes et ailleurs entre 40 et 41. Ni sur les 800 morts à Gurs de l'hiver 40.
La vision des juifs étrangers présents en France est lacunaire, tronquée. Aucun réfugié du Reich sur le sol français! Tous viennent du Yiddishland à en croire les auteurs, Walter Benjamin, Hannah Arendt, Erich Itor Kahn...et les autres sortent droit du Shtetl et sont maroquiniers dans le Pletzl à Paris.

Nulle mention du vocable indésirable. La vision proposée par l'éducation nationale de la Shoah en France commence avec Vichy. La destruction des juifs d'Europe devient un acte importé, où le Reich est seul maitre d'oeuvre, pas de mesures annonciatrices évoquées. Tout commence avec le billet vert en 1941.
Le CNDP qui publie ce guide pédagogique soutient dirait-on une politique de la mémoire où l'étranger n'a pas sa place, alors que la circulaire mentionne:
"
Il ne s’agit pas seulement de transmettre une mémoire et des connaissances : il faut donner à tous les élèves les éléments de culture et de réflexion leur permettant de refuser toutes les formes de racisme et de discrimination et de comprendre que, contraires à la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, elles rendent impossible la démocratie."

La sitographie de la revue est indigente, celle mentionnée sur le site de l'éducation nationale pire:
Izieu dont la présidente dirige la commission qui a accouché de cette souris a depuis 1998 le même site web, figé et privé de contenu, un site vitrine que même votre boulanger n'oserait plus afficher.
Izieu dont les derniers pensionnaires ont été raflés est cité pour illustrer le refuge. Choix judicieux, biaisé?
Gageons que les enseignants curieux ou membres du Réseau éducation sans frontière se pencheront sur le sort des exilés persécutés chez eux, et le sort qui leur a été réservé en France dès 1938.







lundi 1 décembre 2008

Nouvelles des archives du Rhône et d'Afrique du Nord


Dorot association d’histoire,
missionnée par le Centre de Documentation Juive contemporaine Mémorial de la Shoah depuis 2007 pour la localisation et l’acquisition d’archives est heureuse d’annoncer la signature d’une convention entre le CDJC - Mémorial de la Shoah et le Conseil général du Rhône pour les Archives départementales du Rhône le vendredi 12 décembre 2008

Le CDJC, pour ses besoins de communication aux familles de victimes et aux chercheurs, a proposé au Département du Rhône de numériser et microfilmer un ensemble important de documents auxquels il a régulièrement recours dans le cadre de ses activités de communication des sources relatives aux persécutions.

Le CDJC va numériser et microfilmer des documents librement communicables et conservés aux Archives départementales du Rhône. Ils portent sur le sort des Juifs, des Tziganes et autres groupes de victimes entre 1933 et 1948 dans le département du Rhône.

Cette opération sera réalisée grâce au soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah. L'opération est prévue sur une durée de 6 mois.

Les archives départementales du Rhône ont conservé un fond particulièrement important d'archives relatives à l'immigration des années 30 et 40, au sein desquels les dossiers individuels des services de police de la préfecture. Fonds de la Préfecture 1ère division, 5ème bureau, service des étrangers.

La numérisation et l'indexation de ce fond estimé à plus de 700 000 vues pour la partie qui sera traitée dans cette opération représentent une source unique pour les familles et chercheurs qui exploitent les archives afin de documenter le destin des individus ou des groupes de persécutés présents dans le Rhône pendant la période des persécutions.

Volume 565 boites soit environ 57 mètres linéaires.


Le Département du Rhône fournira au CDJC une copie numérique du fonds du Mémorial de l’Oppression et du fonds de la Prison de Montluc.

Les archives de la préfecture relatives à l'internement et aux persécutions déjà microfilmées par le United States Holocaust Memorial Museum à Washington en 1994 seront numérisées ( 44500 vues) des fonds complémentaires repérés par dorot association d’histoire complètent la collecte (environ 19 000 vues), parmi ces « nouvelles » archives les dossiers des étudiants juifs exclus de l’Université, ceux demandant dérogation au numérus clausus imposé par Vichy, dont le frère aîné de Robert Badinter.

doro[t]|association d’histoire a choisi d’allier Histoire et histoire des familles en développant ses projets sous un angle micro-historique. La micro histoire propose aux historiens de délaisser l’étude des masses ou des classes pour s’intéresser aux individus. En suivant le fil du destin particulier d’un individu, on éclaire les caractéristiques du monde qui l’entoure. La réduction d’échelle permet d’examiner les phénomènes à la loupe.

Depuis 2003, l'équipe poursuit un programme de recherche intitulé, « Traces et Empreintes, un exil ordinaire», qui a pour sujet l’exil des réfugiés juifs en Europe. Ce projet, à travers l’étude et l’analyse des destins d'hommes, de femmes et d'enfants à pour but de transmettre l'histoire en analysant le sort des demandeurs d’asile et des réfugiés dans le contexte politique et historique de la seconde guerre mondiale. Ce projet permet la production d’outils d’éducation, d’expositions et de publications destinées aux différents publics concernés: professeurs et élèves, familles, chercheurs et visiteurs individuels.

Les juifs d'Afrique du Nord pendant la Shoah
Parallèlement à la poursuite des travaux sur les réfugiés juifs étrangers dorot association d'histoire en coopération avec une institution israélienne, l'Institut Yad ben Zvi, débute un projet sur la mémoire des juifs d’Afrique du Nord pendant la seconde guerre mondiale. Il s’agit des juifs nés en Afrique du Nord et domiciliés en métropole ainsi que des juifs domiciliés en Afrique du Nord et natif d’une autre zone géographique (parmi eux nombre de réfugiés dont nous avons documenté les destins préalablement), ainsi que des familles séfarades déportées de France. La coopération entre les organisation portera sur le partage des sources d’archives , l'indexation et la numérisation.


























Le 7 janvier 1944 vers 16 h le docteur Albert Bendrihem, médecin juif à Brégnier–Cordon, exerçant malgré les lois antisémites de Vichy est arrêté à Glandieu un hameau situé à quelques kilomètres d'Izieu.

Agé de 37 ans le docteur Bendrihem né à Oran, est bien connu des habitants de la région. Il a résidé avec sa famille à Izieu, puis à Brégnier et enfin à Glandieu.Transféré à Lyon puis à Drancy il est déporté par le convoi 67 vers Auschwitz